Habitations, places publiques, bibliothèques, commerces, écoles… Tous les jours, on côtoie, on vit ou on se déplace dans des bâtiments ou des milieux de vie qui ont été conçus par des architectes. L'architecture est partout et nous concerne tous. Depuis 2014, l'Ordre des architectes du Québec (OAQ) est en campagne pour que soit adoptée une politique québécoise de l'architecture. Une campagne pour que le beau, la durabilité et la qualité prédominent.

Récemment, l’initiative de l'OAQ a pris un nouvel élan avec la publication d'une Déclaration que tous les Québécois peuvent signer en ligne. On y demande que le gouvernement du Québec adopte une Politique de l'architecture assortie d'un plan d'action. Et cela notamment afin de doter le Québec d'une vision globale et commune en matière d'architecture, de mettre en valeur le patrimoine, de sensibiliser les gens à l'importance de la qualité architecturale, de trouver des solutions au défi des changements climatiques, du vieillissement de la population et de l'inclusion sociale.

Cette déclaration est le résultat d'une consultation publique, organisée par l'OAQ et l'Institut du Nouveau monde, à laquelle ont participé 800 personnes en 2017. L'exercice s'est tenu dans 13 villes de la province et s'est terminé par un forum à la fin septembre. Parmi les choses intéressantes qui en sont ressorties, mentionnons la nécessité de miser sur une plus grande qualité du bâti, de développer des espaces de vie plus conviviaux, de faire plus de place aux transports actifs, de freiner l'étalement urbain et d'accorder une plus grande importance au patrimoine et au développement durable.

Cette politique a-t-elle des chances de voir le jour? « L'ancien ministre de la Culture, Luc Fortin, était ouvert aux revendications de l'OAQ, dit Nathalie Dion, présidente de l'OAQ. Il avait même le projet d'adopter une Stratégie gouvernementale pour la qualité architecturale. Depuis, une nouvelle ministre a été nommée, Marie Montpetit. Nous espérons la rencontrer prochainement pour lui faire part de nos doléances. »

Vers une plus grande qualité architecturale

La qualité architecturale est au coeur de la Déclaration élaborée par l'OAQ. Il y a une nécessité de changer de paradigme car «le critère économique est très souvent celui qui a préséance sur la qualité, affirme Mme Dion. Pour contrer cela, il faut notamment abandonner la politique du plus bas soumissionnaire, obligatoire en vertu de la Loi sur les cités et villes. » C'est d'ailleurs ce que plusieurs participants à la consultation ont demandé.

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Accroître la qualité architecturale doit aussi s'effectuer lors de la construction. Selon Mme Dion, pour que cela puisse se faire, il faudrait qu'il y ait une plus grande surveillance de chantier, surtout dans le secteur de la copropriété, souvent aux prises avec des vices de construction, une fois les bâtiments terminés.

Vers des bâtiments plus beaux et durables

Dans la Déclaration, on mentionne aussi l'importance de miser davantage sur la beauté et la durabilité. Une des façons d'y parvenir serait d'étendre les concours architecturaux aux bâtiments autres qu'institutionnels (ex. : les bibliothèques). C'est ce que demande l'OAQ depuis des années. Heureusement, les choses bougent à ce sujet. « La Ville de Montréal a commencé à instaurer des concours et le ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire (MAMO) fait plus de place à cela, dit Mme Dion. Cependant, ce serait bien aussi que des promoteurs instaurent des concours pour certains de leurs projets résidentiels. »

 

L'expérience étrangère

L'expérience étrangère peut aussi être une source d'inspiration pour l'élaboration d'une politique québécoise. Lors du forum tenu à la fin septembre sur la Politique, des architectes de certains pays européens ont ainsi présenté ce qui existe sur leur territoire. En Europe, les initiatives de ce genre sont légion car depuis 2001, l'Union européenne a adopté une directive incitant ses états membres à adopter de telles politiques. Exemples : les Pays Bas en ont une depuis 1991, l'Écosse depuis 2001, le Danemark depuis 2007 et la Norvège depuis 2009. La France a une loi sur le sujet depuis 1977.

Mme Dion trouve la politique danoise très inspirante et verrait d'un bon œil l'implantation d'une politique similaire ici. « Dans ce pays, on exige que les villes aient une politique pour leur territoire, ce qui permet d'avoir un document adapté à chaque contexte, » dit-elle.

Ici, au Québec, l'idée d'adopter une politique fait son chemin. Depuis 2014, l'OAQ a obtenu l'appui de 50 villes dont Montréal, Québec, Laval, Sherbrooke et Gatineau.