Le visage du centre-ville de Montréal change. D’importants travaux d’infrastructures seront en effet entrepris dans le cœur de la ville au cours des prochaines années. L’autoroute Bonaventure disparaitra en partie, une promenade urbaine Fleuve-montagne sera créée, l'autoroute Ville-Marie sera en partie recouverte dans le secteur du Vieux-Montréal, la rue Sainte-Catherine ouest sera revampée et le secteur Griffintown changera complètement d’aspect. Plusieurs de ces travaux devraient être prêts à temps pour le 375e anniversaire de Montréal. Ces travaux de plusieurs centaines de millions de dollars embelliront le visage de Montréal en ajoutant des espaces verts et faisant une plus grande place aux piétons et aux cyclistes.

49 Centre-ville Crédit: Catherine Ferland

Griffintown

Le projet le plus avancé est le plan particulier d’urbanisme (PPU) de Griffintown. Ce quartier, situé au sud du Centre-ville, en bordure du canal Lachine, connaît depuis quelque temps, un regain d’activité grâce à un vaste projet de construction domiciliaire. Le PPU, réalisé au cout de 93 M $, permettra de hausser la qualité de vie des résidants actuels et futurs en ajoutant des espaces verts, en agrandissant le réseau cyclable, en accroissant la quantité d’arbres et en réduisant les places de stationnement sur rue.

L’aménagement de nouveaux lieux publics et la création de plus de quatre kilomètres de rues habitées hausseront de 94 % la superficie du domaine public. Cela représentera 7,25 hectares supplémentaires alloués au public où les piétons auront clairement la priorité.

Si on exclut le parc linéaire du Canal Lachine, les espaces verts et les places publiques verront leur superficie passer de 2,5 à 8 hectares, une hausse de 155 %! On retrouvera une portion importante de ces espaces sur le site des Bassins du Nouveau Havre.

Les cyclistes seront aussi choyés. Actuellement, les aménagements cyclables dans Griffintown totalisent 1,9 km. Au terme de la réalisation du PPU, ces aménagements, notamment sur les rues William et Ottawa, auront augmenté de 200 %, passant de 1,9 à 6,3 km.

Griffintown sera aussi plus verte. L’aménagement des rues permettra la plantation d’environ 1 500 arbres. Les rues où il y aura présence d’arbres passeront donc de 4 à 12 km. À cela, il faut ajouter les arbres qui seront plantés dans les nouveaux espaces publics.

Les 16 000 résidants potentiels de ce quartier auront aussi besoin d’une meilleure desserte commerciale. Aussi, il est prévu que la superficie allouée aux commerces augmente de 200 %.

Enfin, le nombre de places de stationnement sur rue diminuera de 38 %. Au total, le quartier compte environ 6 000 places de stationnement, sur rue et sur des terrains privés. Ces places, occupées en bonne partie par des automobiles provenant de l’extérieur de Griffintown seront appelées à diminuer avec le réaménagement des espaces.

Le projet Bonaventure

À l’est de Griffintown, se trouve la portion urbaine de l’autoroute Bonaventure, une infrastructure routière datant de 1966. Cette autoroute sur pilotis avait grandement besoin d’être rénovée. Au lieu de cela, il a été décidé de la démolir, du canal Lachine jusqu’à la rue Notre-Dame, de créer un boulevard urbain de neuf voies et au centre de cette infrastructure, un grand espace public de 20 000 mètres carrés. Cet espace, de forme allongée, aura une largeur de 42 mètres. Le tout devrait être terminé en 2017, soit à temps pour le 375e anniversaire de Montréal. Cette nouvelle infrastructure sera nommé le boulevard Robert-Bourassa, en l'honneur d'un ancien premier ministre du Québec.

Selon le maire Denis Coderre, cité dans un communiqué, l’espace public permettra de combler en partie le déficit en espace public et vert dont souffre ce secteur alors que le boulevard urbain permettra de relier deux quartiers qui sont séparés par l’autoroute depuis près de 50 ans. Le projet de 142 M$ comprend la plantation de 300 arbres.

Le projet sera réalisé en plusieurs phases et a été planifié de façon à ne pas nuire à la circulation des automobiles et des camions.

Annoncé en grandes pompes le 19 décembre dernier, le projet Bonaventure est cependant déjà critiqué. Dans un communiqué émis fin 2014, Craig Sauvé, porte-parole de Projet Montréal en matière de transport, affirme que la Ville de Montréal va créer un grand espace inaccessible qui sera enclavé entre deux boulevards urbains de 4 et 5 voies. Selon lui, la Ville va aussi rater son pari de relier le quartier Griffintown au Sault-au-Récollet en raison du grand espace qui séparera ces deux quartiers. Enfin, il déplore l’absence de système léger sur rail (SLR) sur les plans du projet, système qui aurait permis de réduire le nombre de voies du boulevard et d’offrir une alternative à l’automobile.

L’idée du SLR n’est toutefois pas abandonnée. « L’Agence métropolitaine de transport (AMT) examine deux options où le SLR circulerait sous terre et aboutirait à la gare Centrale, affirme Jacques Landry, président du comité sur les infrastructures, les technologies et les services aux usagers de Transport 2000.

La promenade urbaine fleuve-montagne

Tout près du futur boulevard Robert-Bourassa, une promenade urbaine sera aménagée au coût de 42 M$, à temps pour le 375e anniversaire de Montréal.  Son point de départ se trouvera au Vieux-Port, vis-à-vis le silo no.5 (immense structure de béton dont on cherche toujours une vocation future). Le tracé, en planification, aura une longueur de 3,8 km et traversera le Vieux-Montréal et le centre-ville pour se terminer dans le parc du Mont-Royal. Il empruntera les rues McGill, Viger, Côte du Beaver Hall, le square Phillips, les rues Sainte-Catherine, Sherbrooke, McTavish et les avenues des Pins et McGill College. Le projet accroîtra les surfaces piétonnes déjà présentes à Montréal. En effet, la rue McGill College deviendra piétonne dans sa partie est alors que la rue McTavish sera entièrement piétonne. La ville planifie aussi planter 150 arbres le long de l'itinéraire.

Une consultation sur le projet devrait s'amorcer d'ici peu et l'aménagement du parcours devrait débuter à l'automne 2015. Selon Réal Ménard, responsable du développement durable, de l'environnement, des grands parcs et des espaces vertes à la Ville, le parcours bénéficiera d'une signalisation intégrée et d'un référent visuel. Il sera donc toujours possible pour  le promeneur de savoir où il se trouve. Enfin, un belvédère sera aménagé près de la rue McTavish et des oeuvres d'art seront installées le long du tracé.

Le recouvrement de l'autoroute Ville-Marie

Une autre erreur d'aménagement urbain sera en partie corrigée d'ici quelques mois. Il s'agit de la tranchée créée par l'autoroute Ville-Marie dans le bas de la ville. Construite au début des années 1970, cette voie rapide a eu pour effet de couper le lien qui existait entre les quartiers Centre-Sud et le Vieux-Montréal.

En prévision du 375e anniversaire de Montréal, il a été convenu de recouvrir la partie est de l'infrastructure, entre les rues Sanguinet et Hotel de Ville. Ce recouvrement permettra de récupérer 19 hectares de terrain et d'aménager un nouveau lieu public aux abords de la station de métro Champ de Mars, considérée comme l'une des plus belles stations de métro au monde. Il permettra d'ancrer le nouveau Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM), situé tout près, au quartier.

En parallèle à la réalisation de ce projet, il est prévu de réaménager le square Viger, l’esplanade du Champ-de-Mars et la place Vauquelin, tous des espaces verts situés à proximité de l'autoroute Ville-Marie.

En novembre 2014, un atelier favorisant l'émergence d'idées d'aménagement a été tenu à Montréal. On y a proposé notamment la création de murs végétalisés, l'aménagement de sentiers multifonctionnels et de sentiers de découvertes artistique et historiques. Au cours de l'année 2015, la Ville sollicitera encore la participation du public sur des thèmes comme la vision d'aménagement, les lignes directrices d’aménagement, les paramètres de design et la conceptualisation du projet.

Ce projet pourrait être le début d'un recouvrement plus grand de l'autoroute, allant de la rue Hotel de ville et s'étendant jusqu'à la rue Saint-Urbain, aux abords du Palais des Congrès de Montréal.

La rue Sainte-Catherine ouest

Autre projet majeur, le réaménagement de la rue Sainte-Catherine ouest, de la rue Bleury à Atwater, sur une longueur de 2,2 kilomètres. La vétusté des réseaux d’aqueduc et d’égout (qui datent du début du siècle dernier) commandait de grands travaux de réhabilitation sous cette artère commerciale. La Ville a donc décidé, dans un même temps, d’en profiter pour revoir son aménagement.

Le projet serait réalisé en deux phases. La première phase, de la rue Bleury à Mansfield, couterait entre 80 et 95 M$ et la deuxième phase, de Mansfield à Atwater serait réalisée par la suite.

Une autre bonne raison d’agir est la compétition. Les commerces sur cette artère sont en compétition directe avec les grands espaces commerciaux qui poussent en périphérie de Montréal (ex. Quartier Dix30) et où il est très facile de stationner.

Quatre options d’aménagement sont proposées.
Option A : création d’une rue à double sens;
Option B : rue à sens unique avec des trottoirs élargis;
Option C : rue avec des trottoirs plus larges que dans l’option B;
Option D : rue avec des espaces multifonctionnels.

L’automne dernier, une consultation publique a eu lieu pour permettre aux gens et aux organismes de se prononcer sur les différentes options. Une vingtaine de mémoires ont alors été déposés.

Piétonniser la rue?

Certains organismes comme la Direction de santé publique (DSP) ont déploré l’absence de proposition offrant une piétonnisation permanente de la rue, de la rue Bleury à Atwater. Selon l’organisme, aucun des quatre scénarios proposés « n’améliore de manière significative la pratique d’activité physique, la réduction du volume de circulation motorisée, le transfert modal vers les transports actifs et collectifs, l’atténuation des conflits entre usagers de la route et la diminution du nombre de traumas routiers. » La piétonnisation nécessiterait le retrait de 480 places de stationnement, mais il en resterait tout de même 12 500, ce qui, selon les auteurs, est très acceptable. Le mémoire de la DSP souligne aussi que la transformation de rues en espaces piétonniers s’est faite avec succès dans plusieurs villes américaines et par conséquent, croit qu’ici aussi, cela pourrait se faire.

69Centreville2 Crédit: Philippe Dépelteau

À l’opposé, la Société de développement commercial de la rue, Destination Centre-ville, est contre la piétonnisation. L’absence de véhicules motorisés nuirait aux affaires, selon elle. Comme améliorations, elle propose plutôt l’élargissement des trottoirs et l’utilisation des ruelles comme espaces piétonniers. Elle se dit aussi en faveur du chauffage des trottoirs (comme cela existe dans d’autres villes) car cela permettrait d’éliminer l’emploi de sels de déglaçage et prolongerait la vie du mobilier urbain.

Dans les faits, il existe des obstacles majeurs à la piétonnisation, selon Jacques Landry. Le premier touche à la circulation. Les rues Sainte-Catherine et de Maisonneuve sont considérées comme une seule artère, l’une étant sens unique vers l’est et l’autre vers l’ouest. « Depuis l’aménagement de la piste cyclable sur Maisonneuve, il n’est plus possible de faire de cette rue une voie à deux sens, dit M. Landry. Il n’y a plus d’espace. Or, si on piétonnisait Sainte-Catherine, il faudrait que le boulevard de Maisonneuve soit à deux sens. L’autre problème, ce sont les stationnements intérieurs. Tous les accès donnant sur la rue Sainte-Catherine seraient inutilisables. Troisième problème, la livraison et la cueillette des marchandises. Plusieurs commerces vendent des biens physiques qui doivent être livrés ou cueillis. »

La consultation a permis de faire ressortir une diversité d’opinions sur l’avenir de cette importante artère commerciale. La suite est pour bientôt. « Au printemps, les élus divulgueront le scénario qui sera retenu parmi les quatre options proposées, » dit Lyne Marier, chargée de relations avec les commerçants et les riverains pour le Projet Sainte-Catherine Ouest.

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Crédit photo image en une: Daniel Rochon